Test 8-Bit Armies
Genre très populaire durant la seconde moitié des années 90 – même sur consoles – avec des représentants tels que Command & Conquer, Alerte Rouge, Warcraft 2, Starcraft 64, Dune 2000, Warzone ou encore KKND, le jeu de stratégie en temps réel s’est progressivement tari sur nos machines au point d’être pratiquement absent sur cette génération. Heureusement pour les nostalgiques, le studio Petroglyph Games a pensé à eux avec ce portage de 8-Bit Armies, premier épisode d’une série qui sera prochainement complétée par 8-Bit Hordes et 8-Bit Invaders. Disponible dès aujourd’hui pour 29,99€, ce retour au front est à ne pas manquer.
« Disque NOD détecté, pour jouer avec le GDI insérez l’autre disque. »
Partant du principe que la guerre est une aberration quelle qu’en soit la cause, 8-Bit Armies ne s’embarrasse pas d’un quelconque prétexte scénaristique pour plonger le joueur sur le champ de bataille. A la place, un rapide tutoriel explique les rudiments de la stratégie temps réel aux novices. Chaque carte s’ouvre sur votre quartier général, socle autour duquel le commandant que vous êtes devra bâtir une base s’articulant autour des fondamentaux : une raffinerie et son collecteur de ressources, une caserne de soldats, une usine de véhicules, une centrale électrique, un laboratoire de recherche technologique, une base aérienne, des tourelles et j’en passe. L’argent étant le nerf de la guerre, vous ne pourrez prospérer qu’en remplissant vos caisses de dollars puisés dans les gisements de pétrole. L’ordre des constructions est dicté par une arborescence à respecter, certaines structures ou unités n’étant disponibles qu’après avoir développé un bâtiment spécifique. Cette logique émane d’une progression voulue par le mode campagne. Clé de voûte de l’expérience, la campagne solo comporte une quarantaine de missions réparties entre deux camps : les renégats et les gardiens, équivalent du NOD et du GDI de Command & Conquer. Les différences entre les deux sont subtiles mais réelles, que ce soit au niveau du type de soldats, de tanks ou de tourelles. La bonne vieille opposition entre avions et hélicoptères de combat peut de nouveau faire rage. Les deux camps restent équilibrés et passer du côté des bad guys ne rend pas l’expérience plus facile.
Les missions de la campagne ont une difficulté croissante donc plus on progresse plus la victoire est difficile à acquérir, mais plus les possibilités sont nombreuses puisque de nouvelles constructions et unités se déverrouillent. Notre présence sur le terrain est motivée par un objectif principal et deux secondaires uniquement en mode normal et difficile pour remporter des décorations supplémentaires. Et oui, il est possible de sauvegarder sa partie en cours pour aller manger au lieu de laisser tourner sa console en pause pendant le repas comme nous le faisions dans le temps. Ne tournons pas autour du pot, si la mayonnaise prend aussi bien dans 8-Bit Armies, c’est que tout ici transpire l’hommage au hit de Westwood jusqu’au canon à ion pour les gentils et la bombe atomique pour les méchants. Ceux qui ont défendu les couleurs de l’aigle ou du scorpion sur la première PlayStation retrouveront immédiatement leurs réflexes devant cette copie carbone, terme employé ici sans connotation péjorative. La place était vacante dans le cœur des fins stratèges, alors il était temps que le vide soit comblé.
La campagne solo permet d’apprendre les bases de la stratégie en temps réel : gestion du brouillard de guerre, fortification, développement de base, planification d’attaques en bourrant un transport de troupes d’infanterie et utilisation de la topologie de carte à son avantage en plaçant des chars en hauteur, en profitant des dangers naturels (lave) ou en créant un goulot d’étranglement. Relativisons tout de même, nous ne sommes pas au niveau tactique d’un Commandos ou d’un Shadow Tactics : généralement celui qui possède le plus d’argent puis d’unités remporte la victoire. C’est d’autant plus vrai que les missions ne proposent pas de handicaps particuliers comme démarrer sans possibilité de créer un bâtiment ou une raffinerie pour se renflouer. Le déroulé est accessible au plus grand nombre et semble destiner cette production à des novices dans le genre, ce que confirme la réalisation bon enfant en voxels colorés en vert, rouge, orange ou violet. Nous sommes loin des tenues de camouflage et des treillis bien ternes. Les explosions en gros cubes donnent plus l’impression de jouer à des LEGO que de mener une opération Tempête du Désert. Les musiques électro composées par Frank Klepacki (déjà à l’œuvre sur Command & Conquer) sont moins inspirées et assez redondantes à la longue, mais contribuent également à l’ambiance festive de cette production guerrière. Les voix anglaises et les cris sont présents mais étouffés par les tirs et les déflagrations.
« Il y a Dieu, puis Kane, puis Seth. »
Une fois la campagne solo bouclée en moins d’une dizaine d’heures (selon le niveau de difficulté), il est toujours possible de prolonger le plaisir en mode escarmouche pour se lancer dans une bataille entièrement paramétrable (carte, ressources, présence de caisses bonus) avec vos propres objectifs (détruire toutes les unités, juste les bâtiments, juste le QG ou une unité spéciale seulement). Viennent ensuite les joutes multijoueurs qui font le sel du genre avec d’un côté une campagne coopérative jouable en ligne à deux sur douze missions, et des affrontements en versus jusqu’à six en réseau. Le plaisir d’affronter un adversaire et non une intelligence artificielle est incomparable et procure des sensations plus grisantes que contre l’ordinateur plus prévisible, plus routinier. Notez que les unités des trois jeux – 8-Bit Armies, 8-Bit Hordes et 8-Bit Invaders – couvrant des mondes et époques différents sont fusionnées dans le multijoueurs de façon à pouvoir affronter plus facilement les possesseurs des autres versions quand elles seront disponibles. La magie du cross-play autorise des délires comme des affrontements hélicoptères versus dragons ou trolls contre tanks. Au total ce sont des dizaines d’unités qui se rencontrent sur le champ de bataille dans un déluge d’obus sans souffrir de ralentissement.
Enfin, attardons-nous sur la prise en main à la manette pour un type de jeu qui se joue habituellement sur ordinateur à la souris. L’ergonomie est tout à fait convenable avec le pointeur d’une souris virtuelle fixe au milieu de l’écran permettant de diriger la caméra directement au stick analogique gauche au lieu d’un curseur libre qu’il faudrait pousser jusqu’aux bords de l’écran pour aller voir ailleurs (le touchpad n’est pas géré). Les touches de la tranche servent de raccourcis aux fonctions essentielles : R2 pour changer le curseur en clé à molette de réparation, L2 pour vendre un bâtiment, L1 pour ouvrir le menu de construction et R1 pour ouvrir le menu des recrutements. Le bouton L3 permet de recentrer la caméra sur son quartier général, ce qui s’avère très pratique quand la base est attaquée par l’ennemi et que nous sommes bien loin d’elle. Quant à R3 il fait apparaître la carte à l’écran, découpée en cases sur lesquelles il suffit de cliquer pour se rendre directement sur une zone précise. C’est, encore une fois, une bonne façon de gagner du temps quand on a des troupes dispersées sur la map. La touche Croix sert de bouton d’action et Triangle, Rond et Carré sont assignées à des groupes d’unités directement lors de leur recrutement. Ce système est fonctionnel mais a pour conséquence d’empêcher la création de nouveaux groupes une fois passée la phase d’affectation. A la place on peut tout de même sélectionner individuellement chaque bidasse ou prendre tous ceux à l’écran avec la direction bas de la croix directionnelle : le système par carré de sélection à agrandir à la souris de Command & Conquer était tout de même plus pratique. Un manuel numérique est de toute façon consultable à tout moment dans le menu pause si un trou de mémoire devait vous frapper, même si les textes sont pour certains trop petits, mal coupés ou mal traduits en français.
Notre verdict
On aime
- Le retour du RTS sur consoles
- Bonne ergonomie à la manette
- Un contenu riche, en solo et en multi
- Prix abordable, même en boite
On n'aime pas
- Aucun contexte scénaristique
- Pas d’unités maritimes
- Seulement trois types de soldats
- La réalisation finement désuète
- La sélection des unités perfectible
Véritable ode à la stratégie temps réel, 8-Bit Armies est une copie conforme du premier Command & Conquer expurgée de sa licence et de ses délicieuses cinématiques de briefing qui faisaient aussi le charme du classique de Westwood. Le résultat est à la hauteur des attentes des nostalgiques, tout en accueillant à bras ouverts les plus jeunes qui voudraient s’adonner à des conquêtes guerrières de manière ludique et bon enfant. En dépit de ses nobles intentions le titre de Petroglyph manque de scénarisation, l’absence de certaines unités apparues à partir d’Alerte Rouge se fait ressentir, et la sélection libre des unités aurait été appréciable. Renouer avec le plaisir simple d’écraser ses adversaires aux commandes de son armée vaut bien quelques concessions.
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