Souviens-toi...l’été deux mille quinze
Lancé à la fin du mois d’août 2015 sur une PS4 alors en début de carrière (et dire qu’elle n’est toujours pas morte !), le jeu Until Dawn a connu un développement houleux. La première fois qu’on entend parler de lui, c’est durant la Gamescom 2012 sous la forme d’un prototype destiné à être joué exclusivement avec l’accessoire PlayStation Move de la PlayStation 3. On est alors en plein dans la mouvance motion gaming et il faut s’agiter physiquement devant son écran pour avoir des sensations à cette époque-là. Le jeu est en vue intérieure, lampe de poche à la main, et contient des phases d’exploration plus prononcées. L’arrivée imminente du nouveau système convainc toutefois Sony Interactive Entertainment de proposer au studio Supermassive Games de s’orienter vers la next gen. C’est ainsi que nous redécouvrons l’année suivante un Until Dawn bien plus agréable à l’œil, avec la présence d’acteurs connus au casting comme Hayden Pannettiere (Heroes, Scream), Rami Malek (Bohemian Rhapsody, James Bond) et Peter Stormare (Prison Break). Élevé au rang d’œuvre culte par la presse et les joueurs, ce titre fera de son développeur un spécialiste des expériences cinématiques d’horreur au point de signer quatre épisodes de l’anthologie The Dark Pictures aux qualités variables, une nouvelle propriété intellectuelle avec The Quarry et le récent The Casting of Frank Stone basé sur l’univers Dead by Daylight. Le studio planche actuellement sur le troisième Little Nightmare laissant ainsi la tâche à Ballistic Moon de s’occuper du portage que voici.
Until Dawn est un jeu d’horreur narratif en 3D proche d’un film interactif dans lequel le joueur suit les mésaventures d’un groupe de huit jeunes adultes réunis dans un chalet à la montagne un an après la tragédie qui a frappé leur bande. En effet, par une nuit glaciale de février, une blague potache a fait fuir Hannah dans les bois, rapidement suivie par sa sœur jumelle Beth, dont elles ne revinrent jamais. Les deux sœurs sont portées disparues, présumées mortes, quand leurs amis se retrouvent dans le même chalet pour se réconcilier. Leurs mauvaises actions ce soir-là ont eu des conséquences qu’ils doivent désormais assumer. C’est cet effet papillon que nous demande d’expérimenter Until Dawn puisque l’intrigue est façonnée par les décisions du joueur (souvent sous la pression du temps), la réussite ou l’échec à des quick time events (presser la bonne touche au bon moment), l’immobilisme de la DualSense (l’agitation par reconnaissance de mouvements est sanctionnée), la découverte d’objets ou certaines actions durant les phases de gameplay.
Afin de nous orienter dans nos choix, des totems liés aux Premières Nations disséminés dans le jeu font apparaître une brève vision de l’avenir au personnage qui le touche. Sachez que les emplacements des totems ont été modifiés dans ce remake pour conserver du challenge, tandis que des nouveaux totems de faim diffusent des visions inédites. Et tout comme dans The Dark Pictures, des interactions supplémentaires avec l’environnement ont été incorporées pour approfondir le background scénaristique depuis son premier essai. De même, le prologue a été légèrement modifié sans toutefois trahir l’esprit de la version originale. Évidemment, avec un système basé sur les conséquences de nos choix, le jeu offre plusieurs fins (dont une est inédite) à ce remake (avec une happy-end pour un des personnages), tout comme deux scènes post-génériques suggérant la mise en chantier d’une suite. Une récente rumeur laisse entendre que le studio Firesprite serait aux commandes. En revanche, comme dans le premier jeu tous les protagonistes peuvent survivre ou mourir d’ici l’aube selon les actions du joueur, ce sera difficile de pondre une fin canonique à la suite...
Ils m’entraînent au bout de la nuit
Si le jeu ne possède pas de mot « remaster » sur sa jaquette, c’est qu’il s’agit d’un remake, d’une refonte totale destinée à la PlayStation 5 et au PC. Ainsi, le jeu a été intégralement recréé sous Unreal Engine 5 pour répondre aux standards actuels à grand renfort de résolution 4K et de Ray-tracing. Les modèles des personnages ont été retravaillés (textures de peau, cheveux), les environnements dans lesquels ils évoluent ont un niveau de détails bien supérieur, les objets à saisir et à orienter dans tous les sens ont gagné en finesse, les effets visuels et météorologiques comme le feu, la neige, le brouillard sont plus réalistes. Tout concourt à rendre l’expérience plus immersive que jamais. La palette de couleurs utilisées est aussi plus large, le soleil couchant du début du jeu tranchant avec l’atmosphère bleutée omniprésente sur PS4. Les éclairages différents rendent l’ambiance globalement plus sombre que par le passé. De nouvelles animations contextuelles (lors de saisie d’objets par exemple) et expressions faciales rendent le casting plus humain, avec des réactions moins mécaniques. Les vidéos comparatives qu’on trouve sur le net (y compris le trailer officiel PlayStation) ne font pourtant pas l’unanimité et sur certaines scènes, force est de constater que le rendu était plus convaincant sur la version de 2015. Une question de goût j’imagine.
Le nombre d’images par seconde est stabilisé à trente et le menu option ne permet pas de permuter entre qualité graphique ou performance. L’ambiance sonore jouit elle aussi d’une profonde refonte avec de nouveaux bruitages compatibles avec l’audio 3D et d’une nouvelle bande-son composée par Mark Korven, compositeur de la musique des films The Witch et The Lighthouse pour ne citer qu’eux. Dans sa version française, la synchronisation labiale laisse parfois à désirer alors il est conseillé d’y jouer en version anglaise pour éviter cet écueil et profiter à fond du jeu des acteurs. Enfin, la caméra fixe qui privilégiait des travellings cinématographiques stylés mais parfois handicapants pour la visibilité et les déplacements cède sa place à une caméra libre à la troisième personne orientable avec le stick analogique droit. Certains moments clés restent néanmoins sur rail pour maîtriser les mécanismes de la peur, car au-delà de l’aspect technique évolué, Until Dawn 2024 reste un très bon distributeur d’angoisse, avec des jump-scares réguliers, de belles montées en tension. Mêlant suspense, horreur psychologique, slasher et torture-porn, le titre mange à tous les râteliers pour provoquer des émotions et marquer les esprits. C’est bien simple, je me souvenais encore de certaines scènes presque dix ans après mon unique passage dessus. Une réussite qui demeure intacte en qualités et en défauts avec un rythme toujours en dents de scie et un final qui part quelque peu dans le grand n’importe quoi.
En lorgnant du côté du monde PC, on devine bien que ce remake cible quasi exclusivement les joueurs qui n’ont jamais tâté la version PS4, les seuls pour qui le tarif de 69,99€ sera acceptable tant les ajouts sont mineurs pour les vétérans. La venue prochaine d’un long métrage éponyme sur grand écran fait penser à une vaste opération marketing pour rafraîchir la licence et toucher un nouveau public de teenagers quand les autres, plus vieux de neuf ans, ne verront que peu d’intérêt à remettre une telle somme pour une expérience similaire. Si encore Sony avait proposé une upgrade à 9,99€ comme pour The Last of Us Part II ou le futur Horizon Zero Dawn, la pilule aurait été plus digeste.
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