Test Forgotton Anne

Publié le par Vincent
PS4

Nouvelle incartade indépendante pour Square Enix via son label Collective, Forgotton Anne est le premier jeu du studio danois ThroughLine Games fondé en 2014. Ce jeu d’aventure en 2,5D est porté par son histoire originale et son esthétique étonnante donnant l'impression d'évoluer en temps réel dans une cinématique animée. Un tour de force visuel pour un titre intéressant.

Bureau des objets perdus

Imaginez un royaume surnaturel dans lequel des objets oubliés par leurs propriétaires jouiraient d'une seconde vie. Doués de mouvements et dotés de la parole, ces articles autrefois inanimés tels qu'une écharpe, une chaussure, un porte-manteau ou un livre se mettraient à vivre comme dans le Merlin l'Enchanteur de Disney. Dans un semblant de société où tout le monde a sa place, chacun tiendrait son rôle en attendant le grand voyage vers l'Ether, une sorte de paradis pour les objets perdus, la promesse d'un retour à la civilisation humaine. N'imaginez plus, ce monde fantastique existe, c'est celui du jeu Forgotton Anne. Tout n'est cependant pas parfait dans cette utopie puisqu'un groupuscule de rebelles tente un soulèvement en dynamitant des points stratégiques de la ville. Suivant les ordres du leader Bonku, une jeune fille prénommée Anne, élevée au rang d'exécutrice, doit mater la rébellion en faisant tomber le Ché Guevara local, un certain Fig. Mais les apparences ne sont-elles pas trompeuses ? Quels intérêts servez-vous réellement ? A vous de le découvrir en terminant le jeu !

Anne est l'exécutrice des Terres Oubliées, cela signifie qu'elle dispose de l'autorité suprême pour enquêter sur les actions dissidentes, pour interroger les citoyens et aller où bon lui semble dans la ville. Elle est perçue comme une héroïne par certains, comme un instrument d'oppression par d'autres. Elle peut surtout exécuter une sentence de mort sur les oublions, nom donné aux objets rescapés. Pour ça elle possède un anneau Arca à sa main capable de distiller les oublions, de leur ôter leur énergie vitale appelée anima. Cette énergie ne peut être stockée qu'en une petite dose dans son gantelet ce qui lui confère une importance capitale pour le gameplay, en particulier pour la résolution des nombreux puzzles qui jonchent l'aventure. En effet, la jeune fille ne peut déverser ce fluide énergétique que dans une seule machine à la fois et doit repasser par la case recharge régulièrement, soit en récupérant l'énergie qu'elle vient de verser dans la machine précédente, soit en pillant des cylindres disséminés dans la ville, soit en se servant directement sur les oublions. Les habitants sont des ressources que vous pourrez exploiter en échange de leur vie ce qui confronte le joueur à des dilemmes moraux assez gênants. Devez-vous par exemple laisser fuir un rebelle ou le dissoudre ? Allez-vous désigner qui est en réalité un traître parmi deux civils ? Devez-vous mener un interrogatoire par une approche autoritaire ou coopérative ? Des choix qui placent notre innocente dans des positions inconfortables mais nécessaires pour progresser dans l'aventure. Attention aux répercussions (superficielles) sur la suite de l'histoire.


La production de ThroughLine Games est un jeu d’aventure « story driven », comprendre par-là que c’est avant tout l’histoire pleine de (bons) sentiments et non le gameplay qui doit constituer la première motivation du joueur. A ce titre le scénario entretient bien le mystère autour de l’identité du chef de la résistance, des motivations réelles des rebelles, de celles de Bonku et du passage vers l'Ether. Les interactions avec les oublions sont régulières, par le dialogue, avec souvent deux choix de réponse pour bien laisser transparaître la personnalité de notre avatar. Son journal se met régulièrement à jour avec des détails supplémentaires (bouton Triangle) quand ce ne sont pas des mémentos qui viennent s'y greffer quand on les trouve. Donner vie à des objets du quotidien rend la narration originale et plaisante une fois qu'on a digéré le fait que notre humaine est en train de parler à un fauteuil ou un tapis de gym ! Dommage toutefois qu'on ne puisse pas accélérer les dialogues : la lecture des sous-titres en français étant généralement plus rapide que leur écoute en anglais, on aurait aimé pouvoir accélérer le rythme des élocutions pour gagner du temps. Tant pis.

Dix de retrouvés

Le reste du gameplay se divise en phases de plateformes et de puzzles assez classiques. La première tout d’abord est plutôt quelconque, avec des sauts, des escalades de rambardes et des courses pour prolonger la distance des bonds. Assez rapidement la technologie nous viendra en aide avec une paire d'ailes mécaniques décuplant les distances de saut, en hauteur et en longueur. Une aide appréciable à condition d'avoir de l'anima en réserve et de supporter la petite seconde de latence entre la pression du bouton L1/R1 et leur déploiement total. Pour ce qui est des puzzles c'est une autre paire de manche puisque les moments de réflexion sont aussi nombreux que réjouissants. Des leviers à tirer ou à pousser, des flux d'énergie à aiguiller vers la bonne destination, des bidouillages d'élévateurs à opérer, des sphères à placer aux bons endroits… ces exercices stimulent un minimum notre matière grise pour notre plus grand plaisir. Certains mécanismes à activer à deux peuvent même nous accaparer un petit moment, preuve qu'ils sont plus complexes qu'ils en ont l'air.

Enfin, l'exploration des décors complète cette aventure avec des points d'intérêt bien visibles puisque marqués par des cercles rouges quand on s'approche d'eux, et des niveaux étalés sur plusieurs plans pas toujours évidents à distinguer d'ailleurs. Il faut bien garder à l'esprit qu'on peut glisser au premier plan ou s'enfoncer en arrière-plan quand on passe devant un escalier ou un pas de porte. Les images et vidéos qui illustrent ce test montrent bien l'identité visuelle forte de ce titre. Le moteur Unity est habilement sollicité pour nous donner l'impression d'évoluer dans une cinématique dessinée à la main ou un dessin animé japonais. Les transitions entre cut-scenes et gameplay sont ainsi invisibles, et la caméra use de travellings et de gros plans aux moments opportuns pour donner à la mise en scène un cachet très septième art. Les animations des personnages contribuent aussi à ce rendu charmant que de mélodieuses symphonies dignes d'un film à grand spectacle à la Spielberg accompagnent. C'est du tout bon pour les yeux et les oreilles pendant les sept à huit heures que réclame l'histoire pour en venir à bout. Une durée de vie à la hauteur de son prix de 19,99€ et un temps suffisant pour s'attacher aux personnages et ressentir un minimum d'empathie pour eux. Puisque le jeu mise surtout sur son histoire, autant qu'elle soit émouvante pour nous toucher. A vous de voir si vous serez capable de lâcher une larme à la mort d'une cravate à lunettes ou d'un stylo plume bavard. Ce n’est pas forcément gagné !

Notre verdict

On aime

  • L’impression d’évoluer dans une cinématique
  • Les belles mélodies
  • Les choix moraux
  • De bons petits puzzles
  • Une durée de vie correcte

On n'aime pas

  • La partie plateforme moyenne
  • Le temps de latence de l’ouverture des ailes
  • Se repérer sur plusieurs plans
  • Impossible de passer les dialogues
  • Les rebondissements clichés

Forgotton Anne est un jeu d'aventure misant davantage sur son scénario original à rebondissements (bien que prévisibles) et sur sa réalisation digne d'un dessin animé interactif pour se démarquer que sur son gameplay classique alternant les phases de plateformes, d'exploration et de puzzles. La partie casse-tête est la plus réjouissante du gameplay puisqu'elle semble être la plus travaillée, suivie de près par sa narration bien mise en scène alternant choix de réponses et d'actions. Agréable à parcourir une première fois, elle ne marquera cependant pas les joueurs de manière indélébile tant elle est convenue et dépersonnifiée.

Note finale : 7 / 10
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